Appelez-moi C57BL !

Pharmacologie

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Depuis la publication du génome humain, la communauté scientifique attendait avec impatience les résultats du décryptage de celui de la souris. Certains chercheurs du Mouse Genome Sequencing Consortium vont même jusqu’à affirmer que ces résultats ont encore plus de valeur pour la recherche que le décryptage du génome humain lui-même. Mais pourquoi tant d’enthousiasme ?

Tout simplement parce que, comme le souligne Mark S. Boguski (Fred Hutchinsson Cancer Research Center), dans un entretien pour Nature, les biologistes travaillaient jusqu’alors « dans le noir » et qu’ils voient maintenant le champ de leurs recherches « s’illuminer ».

Née en 1909 des travaux de Clarence Cook Little, la souris de laboratoire devient en 1921 la C57BL, souris la plus utilisée par les généticiens et dont le séquençage du génome vient de s’achever. En 1987 la première souris « knockout » voit le jour lorsqu’une équipe de chercheurs parvient à activer un gène présélectionné dans les cellules souches embryonnaires. Dès la fin des années 80, la recherche est donc capable de déclencher et d’observer le développement d’un caractère ou d’une maladie comme le cancer chez la souris au moment précis où l’expérimentateur le décide...

Et quand on sait que le séquençage, en 2002, du génome de Mus musculus a révélé 30 000 gènes dont 99 % admettent une contrepartie directe dans le génome humain, on se rend un peu mieux compte du formidable outil maintenant mis à disposition des chercheurs du monde entier.

Le décryptage du génome de la souris n’est pourtant qu’une première étape, car si travailler sur des modèles de souris autorise des manipulations sur chaque gène pour déterminer précisément leur fonction, il reste néanmoins à identifier les effets de leur mutation.

Cependant c’est tout le rythme et le caractère de la recherche qui se trouve aujourd’hui réorienté et précisé car chaque observation physiologique, clinique et comportementale va dorénavant permettre des comparaisons inédites entre les génomes des espèces murine et humaine.

Par ailleurs, si les humains et les souris semblent avoir approximativement le même nombre de gènes, le génome murin (2,5 milliards de paires de bases) est inférieur de 14 % à son homologue humain (2,9 milliards de paires de bases). Plus encore, les séquences génétiques entre les deux espèces sont similaires à 90 % et toutes deux aiment le fromage !

Bref, tout laisse à penser qu’il y a environ 75 à 125 millions d’années, un ancêtre commun aux souris et aux hommes parcourait notre terre. Pourquoi les souris ne nous ressemblent-elles pas plus ? Là encore l’analyse des deux séquences va être riche d’enseignements sur la dynamique d’évolution génétique. Certaines zones du génome ne correspondent en effet à aucune fonction et se répartissent dans le génome au fils du temps, donnant ainsi de précieuses indications sur les processus évolutifs et leur vitesse. Le séquençage du génome de Mus musculus annonce donc bien une nouvelle ère de la recherche en génétique en fournissant aux chercheurs un outil précieux à de nombreux points de vue.