Prébiotiques

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« Les perspectives d’applications sont très larges, car il n’y a pas comme dans le cas des probiotiques le problème de viabilité des souches dans le produit fini. Les seules contraintes peuvent être des problèmes liés à l’acidité des produits », remarque Tim Van der Schraelen, responsable marketing et communication de Beneo-Orafti. Les secteurs laitiers, de la boulangeriepâtisserie et des céréales restent ceux qui connaissent le plus de développement. La manière de communiquer sur les prébiotiques est aussi très différente en fonction des différents pays européens. « Mais, paradoxalement, bien que les fibres soient reconnues pour leur effets nutritionnels, elles sont souvent présentes dans les produits d’abord pour leurs effets texturants, ainsi que pour diminuer la teneur en sucres et en matières grasses », modère Philippe Courbé, directeur général d’ID Food.

Selon les définitions reconnues de Gibson en 1995 et Schrezenmeir en 200l, un prébiotique est défini comme un « ingrédient alimentaire non digestible qui stimule de manière sélective au niveau du côlon la multiplication ou l’activité d’un ou d’un nombre limité de groupes bactériens susceptibles d’améliorer la physiologie de l’hôte ».

Dernières nouveautés

Déjà présente depuis plus d’une dizaine d’années, l’offre de fibres prébiotiques s’affine avec de nouvelles origines et formes adaptées aux différentes applications. Tate and Lyle lance deux nouvelles fibres, issues du maïs : Promitor Soluble Gluco Fibre, composée de chaînes de glucose de faible poids moléculaire et Promitor Resistant Starch, contenant des chaînes de haut poids moléculaire. « De faible viscosité, Promitor Soluble Gluco Fibre est stable aux pH acides. Soluble, elle ne trouble pas les boissons ; dans les produits laitiers, elle résiste à la pasteurisation et à la fermentation », argumente Sandra Einerhand, responsable nutrition et santé de Tate and Lyle.

« Promitor Resistant Starch est, quant à elle, une fibre prébiotique insoluble. Elle résiste bien aux traitements thermiques et à l’extrusion, et réduit l’absorption de matières grasses dans les produits frits. Sa faible rétention d’eau est, par ailleurs, une qualité importante dans les applications de biscuiterie et boulangerie ». De son côté, Cosucra, producteur d’inuline et d’oligofructose (FOS), lance deux nouvelles références : Fibruline S20, avec une solubilité garantie de minimum 20 %, améliorée par rapport à Fibruline Instant Et, Fibruline DS2, une inuline désucrée, avec maximum 2 % de sucres.

Par ailleurs, Synergyl de BeneoOrafti, mélange d’inuline et de FOS pour une action tout au long du système digestif, a fait l’objet d’études cliniques récentes. « Cet ingrédient augmente le taux de calcium absorbé ainsi que la densité osseuse. Ceci a été démontré, lors d’une étude menée auprès de 100 adolescents. Certains d’entre eux ont reçu, pendant une année complète, une dose journalière de 8 g de Synergyl et les autres, une dose équivalente de placebo. L’absorption du calcium et la densité osseuse ont été plus élevées chez ceux ayant consommé Synergyl. Une autre étude sur la même population démontre qu’à la dose de 8 g/jour pendant un an, Synergyl participe au maintien d’un poids corporel et d’un indice de masse corporelle (IMC) appropriés chez les adolescents », expose Tim Van der Schraelen.

L’évaluation de son potentiel dans la lutte contre le cancer du côlon est en cours.

Spécificités

Selon les applications, certaines fibres prébiotiques sont plus adaptées que d’autres. « En effet, les inulines et les FOS conviennent à la plupart des applications mais craignent l’acidité combiné avec des DLUO longues. Les appliquer dans des produits type Coca-Cola est très difficile. Dans les jus de fruits frais, par exemple, c’est plus facile car la DLUO est plus courte et la température plus adaptée », remarque Tim Van der Schraelen. Les fibres de pomme et d’acacia seront mieux adaptées : elles ne s’hydrolysent pas et ne développe pas de viscosité. « En boulangeriepâtisserie, dans les cas où la compétition entre l’inuline et l’eau est trop forte et génère des pâtes plus fermes, nous préconisons l’inuline soluble Fibruline S20 ou l’oligofructose Fibrulose F97 pour des applications extrêmes », précise Mary Descamps, ingénieur application chez Cosucra. « Dans les sucres cuits, Fibruline S20 est plus adaptée que les oligofructoses qui donnent des bonbons pouvant coller dans le temps. Dans les glaces, Fibruline S20 donne aussi de très bons résultats ».

Effet sur la texture

« Aux effets prébiotiques de la fibre d’acacia s’ajoutent des effets technologiques comme une texture en bouche recherchée dans les boissons, une stabilité aux échanges d’eau dans les produits céréaliers ou une amélioration du croustillant dans les produits extrudés. Elle a aussi la particularité d’avoir un poids moléculaire très élevé tout en étant peu visqueuse en solution », précise Francis Thévenet, responsable des applications de CNI. « Cette particularité conduit à une fermentation progressive tout au long de l’intestin, sans effets secondaires induits tels que ballonnements et flatulences ».

Pour ce qui est d’Actilight, fabriquée à partir de sucre issu de betterave, elle ne contient que des FOS à courtes chaînes et elle est non visqueuse. « L’efficacité d’Actilight apparaît à partir de 2,5 g/ jour, ce qui permet de consommer un nombre de portions inférieur par rapport aux inulines et FOS issus de chicorée », explique Céline Hurson, ingénieur marketing chez Syral. « Une récente étude sur des fromages à tartiner et des crèmes desserts, montre qu’Actiligh exhauste le goût des aromes », relate Céline Hurson.

Par ailleurs, on peut citer aussi, le polydextrose, un polymère de glucose, qui présente aussi des effets prébiotiques. Danisco en propose sous la marque Litesse. Associés aux probiotiques, les prébiobiotiques offrent des occasions de nouveaux produits pour les fabricants agroalimentaires. Selon Mette Sveje, directrice Applications laitières chez Danisco, il a été démontré que le polydextrose est un prébiotique efficace qui n’est pas fermenté par les probiotiques dans des desserts à base d’eau.

Des études sur la stabilité du Litesse Ultra (une qualité supérieure de polydextrose hydrogéné) dans le yaourt ont démontré qu’il n’était pas modifié dans le yaourt pendant toute la durée de conservation.

Pas seulement bifidogène

Des études in vivo sur rats (inoculés avec une flore humaine) ont démontré des effets prébiotiques de Pomelite LV, fibres natives de pomme, de la société Val de Vire. « Cette fibre a l’intérêt de stimuler une autre flore que celle des bifidobactéries. Elle favorise le groupe des bactéroïdes, groupe bactérien plus « spécialisé » dans la digestion des produits végétaux. Des études américaines ont mis en évidence la déficience en bactéroïdes des populations en surpoids et obèses. En termes de formulation, nos extraits résistent bien aux formulations acides, aux enzymes digestives, et aux traitements thermiques et conviennent aux produits de panification », analyse Hélène Masson, chef de projet marketing et commercial de Val de Vire. De même, la fibre soluble Nutriose de Roquette, issue de maïs ou de blé, agit elle aussi sur d’autres types de bactéries que les bifidogènes. « Elle a un rôle positif sur la flore saccharolytique et sur les lactobacilles et diminue la concentration en Clostridium perfringens », précise Catherine Le Bihan, responsable développement marché de Roquette.

Preuve que le sujet des prébiotiques intéresse, une Task Force, comprenant des chercheurs et différents acteurs industriels et institutionnels, vient de se mettre en place à l’ILSI pour donner une position scientifique sur les prébiotiques. Un des buts sera de se mettre d’accord sur leur définition et leurs actions.